Notre éducation nous a poussé à dire presque toujours oui. Pourtant, dire non est très puissant puisque le mot permet d’arbitrer et de choisir (comme le oui d’ailleurs). Sauf que, la confusion existe entre “je te dis non à ce que tu me proposes/non à ce que tu me demandes” (première perception) et “je dis non à toi” (deuxième perception).
Ecoutez cet article en podcast :
Dans la première perception, dire non signifie repousser une proposition, une sollicitation. Dans la deuxième, il s’agit de repousser la personne. Cette confusion crée ce malaise : “j’ai dit oui (parce que je t’apprécie), mais en fait, je ne peux pas/je ne veux pas/je ne sens pas et j’ai vraiment envie de dire non (mais je n’ose pas)”.
Apprendre à dire non est l’une des leçons apprises auprès de ceux qui réussissent…
Il y a surement des quantités de raisons d’apprendre à dire non, j’ai envie de privilégier celles-ci…
1 – En disant non, je me respecte
Avez-vous croisé de ces grandes âmes qui sont à la fois d’une générosité sans limite et en même temps semblent habités de frustrations abyssales. Il n’est point question ici de rejeter le service et l’attention à l’autre (je repense à mon oncle Paul). Il est question de se respecter, ce qui peut devenir une nécessité de survie.
Je dis “non” car j’ai besoin d’air, de respiration, d’espace, de repos, de recul, de temps. Je dis “non” aussi parce que j’ai des priorités et des devoirs, parce que j’assume des responsabilités. Je dis “non à la chose” pas “non à toi”. Je dis “non” car j’ai besoin d’être respecté.
2 – Si je dis “non”, je me débarrasse des petits problèmes que les autres ont envie d’empiler sur mon bureau et dans mon emploi du temps
Corollaire du point 1, si je ne me respecte pas, les autres sont susceptibles de ne pas le faire non plus. Il y a risque à ce qu’ils viennent avec leur épaisse pile de problèmes, de délégations inverses, leur envie de se débarrasser de ce qu’ils ont à faire (et accessoirement ce pour quoi ils sont payés) dans mon antre grande ouverte.
Dans les formations sur l’optimisation du temps, ce sujet fait souvent débat. Pour garder (croit-on) une bonne relation de travail, on accepte le déballage sur notre bureau. Dès que cela se produit, c’est le début du grand foutoir de son emploi du temps, et partant, de la tenue de ses objectifs.
Econduire gentiment les chronophages et autres dérangeurs de tout poils qui lisent le grand “oui” affiché sur notre front, leur dire non sans se justifier, est un pas de géant en avant pour passer à une meilleure maîtrise de son temps et de son projet.
3 – Dire non pour sortir de cette illusion que tout est possible
L’une des grandes difficultés à laquelle nous sommes tous maintenant confrontés, est la profusion gigantesque des possibles. Cette profusion devient source de tourments, devient un vrai défi de sagesse pour les prochaines générations. Tout semble accessible. Tout parait disponible. On voudrait tout accumuler (les choses, les relations, les expériences), alors que cela est vain.
A l’image de l’univers en expansion, la société actuelle nous offre tant de possibles que le simple fait de les imaginer nous fait croire que nous pouvons nous les approprier. C’est faux, chers amis ! Une grande partie du travail intérieur consiste à renoncer, à dire non. Ce qui ne signifie pas une existence terne et sans relief.
Comme me disait un chef d’entreprise un jour : “dès que l’on ferme une porte, des quantités d’autres se présentent”.
Bref !
Je te dis non…
- et je t’aime quand même…
- et je me respecte…
- et je ne prends pas sur moi ce qu’il t’arrange de déverser dans ma gamelle…
- et je grandis en sagesse dans ma capacité de détachement…
Tout l’art consiste à délivrer un “non positif”… Mais cela est une autre histoire.
Et pour mieux y arriver…
Quand vous êtes sur le point de dire “oui”, posez-vous 3 questions :
- Dire oui à cette requête, est-ce que “je le sens bien” ?
- Est-ce bien de ma responsabilité de prendre en charge cette demande ?
- A quoi je renonce vraiment, quelles opportunités improbables mon “non” va-t-il faire émerger ?
Envie de commenter ci-dessous ?
Délivrer un “non positif”, me fait penser à une autre manière de dire les choses par Thomas d’Ansembourg (voir le livre Cessez d’être gentil soyez vrai”) “a quoi je dis “oui” quand je dis non” et inversement. Cette petite phrases m’aide beaucoup à prendre certaines décisions difficiles, car lorsque je répond “non” à quelqu’un et que cela me mets mal à l’aise, je pense à quoi je dis “oui” (me libérer du temps pour moi, pour ma famille, pour d’autres priorités que l’autre ne connait pas…). Comme le Ying et le yang, cela m’aide à clarifier mon choix et sur quelles valeurs il repose. Choisir est difficile car il implique forcément aussi de renoncer, éclairer son choix avec un peu de recul en s’appuyant sur ses valeurs profondes est sans doute une piste pour être plus serein dans sa décision.
Yes, c’est exactement ça. A chaque fois que je ferme une porte, s’ouvrent de nouvelles perspectives que je ne voyais pas. Donc, fermer des portes est une manière paradoxale d’en ouvrir d’autres…
Quand je dis “non, je ne peux pas répondre à ta demande”, j’essaye d’ajouter “mais je connais quelqu’un qui pourra” ou ” parce que je pense qu’il serait plus avantageux pour toi de…”
@Jean-Paul,
C’est sympa de procéder ainsi. Cela permet de fermer la porte avec délicatesse, et d’encourager… Nous avons tous besoin d’être encouragé, n’est-ce pas ?