L’injure sur un réseau social, vous venez de vous en prendre une en pleine poire. Que faut-il faire ? Quelle différence entre injure et colère, comment discerner la différence ? Pourquoi une injure appartient-elle à celui qui l’a émise ? Est-ce répréhensible devant la loi d’agresser verbalement ?
Il existe une grande confusion entre injure et colère…
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L’injure sur un réseau social du courageux énervé
Derrière un clavier, un courageux énervé éructe une injure sur un réseau social parce qu’il est en désaccord avec votre article ou votre commentaire. Il vous agresse personnellement, vous traite de tous les noms. Le pire de tous est un petit vocable de 4 lettres pas plus (pour les connaisseurs, j’ai emprunté l’expression à la magnifique chanson “le Blason” de Brassens, que j’ai interprétée ici).
Ce petit vocable est « nazi » bien sur.
J’ai lu un jour un propos concernant les occurrences d’apparition du mot “nazi” dans les communications écrites sur les réseaux. Cette “loi” non vérifiée évoquait qu’après plusieurs montées en tension, quand l’audience est importante, l’une des parties allait finir par traiter l’autre de nazi. Cette agression verbale est à l’extrémité du spectre et traduit bien évidemment l’absence d’arguments (même s’il existe encore des partisans du nazisme, mais ils sont rares). Pourtant, cette pratique extrême est d’usage jusqu’au plus haut niveau de certains états, qui se reconnaitront d’eux-mêmes.
Sans aller jusqu’au petit mot de 4 lettres, toute injure est une agression. La loi française du 29 juillet 1881 sur la liberté de la presse condamne et punie l’injure. L’amende peut grimper jusqu’à 12 000€ à l’heure où j’écris cet article. L’insulte (injure moins grave) coûte moins chère, mais c’est également un délit.
Soyons clair et net : l’injure est interdite !
J’ajoute que, enseigné par quelques sages dont de jeunes guides Berbères dans le désert, j’ai appris que toute parole appartient à l’émetteur, définit même l’émetteur. Mon injure me revient directement en pleine figure. Cyrano le démontre parfaitement dans ce célèbre échange de l’acte I, alors qu’il se fait verbalement agressé en public :
– Le Vicomte : Maraud, faquin, butor de pied plat ridicule !
– Cyrano : Ah ? Et moi, Cyrano-Savinien-Hercule de Bergerac.
Edmond Rostand avait tout expliqué dans cette réplique.
Pourtant la colère monte…
Sur une autre rive se trouve la colère. La colère mène-t-elle à l’injure ? Ce n’est en rien obligatoire. La colère est une émotion. Par essence, l’émotion fait partie intégrante de la nature humaine. Inutile de renier les émotions, elles existent. Si certains les contiennent, à leur risques et périls (lire la colère peut-elle sauver), d’autres, les leaders, nous emmènent peut-être à la catastrophe en les éradiquant de leurs signaux intérieurs à considérer.
Comme je l’explique dans plusieurs articles, la colère est une manifestation qui signifie que « je ne me sens pas respecté ». Je raconte même comment dans une négociation, une saine colère avec un client m’a permis de maintenir en vie un contrat de 3M€. Dans la colère, les propos deviennent erratiques, désordonnés, sonores. L’émotion a pris le contrôle et tout est jeté sur la table de manière confuse.
Pourtant, colère n’implique pas injure. Le personnage en colère a-t-il été préalablement sensibilisé à la signification de cette émotion envahissante, est-il en conscience qu’il peut employer le « je » (« je suis furieux »), plutôt que le tu (« tu es + invectives et agressions »). Parler des effets sur soi plutôt que se jeter sur l’autre. Rester dans les arguments.
Je dirais même plus (citant par la Dupont ou Dupond), derrière un clavier, est-il possible de dépasser le stade de la colère que suscite tel ou tel propos sur un réseau social, aller faire un tour dehors, marcher 30 minutes pour rassembler les arguments, les faits, les ingrédients pour nourrir une réponse solide, un commentaire éclairé, un débat d’idées, ou, si la méditation a produit cette proposition… ne pas répondre du tout.
La colère est une émotion. Les émotions font partie intégrante de notre humanité.
L’insulte est une agression répréhensible.
Oui mais, que faire de l’injure sur un réseau social ?
Si je subis une agression après une publication dans un réseau social, “non d’une pipe, je ne vais pas en rester là” me souffle ma colère !
Minute papillon : d’abord n’est-ce pas l’heure de m’interroger ? Allez, je vais faire un petit tour à pied. Ce que j’ai lu comme une injure, s’agit-il d’un débat d’idées ou suis-je personnellement pris à partie, attaqué dans ma dignité ? Il est important de faire le distinguo.
Si c’est un débat d’idées, j’entre dans le débat… ou pas. Quelquefois, le débat dénature le propos initial, il devient plus astucieux de laisser les lecteurs comprendre que les commentaires n’enrichissent pas le propos initial, ou conduisent sur un chemin détourné.
En revanche, s’il s’agit d’une injure, insulte, d’une agression personnelle, j’ai 2 options :
-
- option 1 je supprime le commentaire. Oui madame, oui monsieur, je supprime le commentaire. L’injure n’amène rien de constructif au débat. Elle me touche personnellement. Une fois éliminée, ça va mieux, je peux aller faire un tour à pied pour méditer. Si certains pensent qu’il s’agit de censure, je leur propose l’option 2.
- option 2 : aller au commissariat de police pour dénoncer l’agresseur en vertu de la loi du 29 juillet 1881.
Après la lecture de ce post, des millions de lecteurs vont s’empresser au poste de police de leur quartier. C’est pourquoi je préfère encourager l’option 1 et laisser notre maréchaussée s’occuper des voleurs et des assassins. L’option 1, supprimer le commentaire, reste cependant de saine pratique : l’épidémie d’injures et autres insultes emmène toute l’humanité vers une gigantesque auto-destruction.
L’injure ou l’insulte n’amène rien au débat ! Exit !
Avez-vous remarqué le courage derrière les claviers, les courages les plus nobles étant de ceux qui camouflent leur identité ?
Prôner la paix, c’est agir vigoureusement contre ceux qui souhaitent abaisser, mettre la botte, démolir.
Rester dans le débat d’idées.
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